Centre de conservation
des Vautours fauves
Sveti juraj, croatie
Ce mois ci je pars découvrir les plus grands oiseaux de Croatie et le centre qui se bat pour les sauver de l’extinction : les vautours fauves.
la structure
Goran Susic, ornitologue, étudie les vautours fauves depuis les années 70. Il a créé le centre de conservation des vautours fauves en 1992 suite à la constatation du déclin de leur population et à l’urgente nécessité de venir en aide aux vautours en détresse. Depuis la création du centre de conservation, Goran et son équipe a réussi à faire passer le nombre de vautours de 60 couples à 140 couples et il a sauvé près de 160 vautours en détresse. Malheureusement, aujourd’hui l’activité du centre est gravement menacée. Suite à des conflits avec les locaux sur l’ile de Crès où ils étaient initialement installés, le centre a été obligé de déménager en 2013. Depuis, le centre a perdu de sa renommée, il souffre d’un manque de visiteurs, de volontaires et, surtout, de soutien financier du gouvernement pour maintenir leur activité. Par faute de moyens, ils sont loin de pouvoir mener leurs actions dans de bonnes conditions : pas de bateau pour les sauvetages (ils dépendent de la disponibilité du taxi boat du village qu’ils doivent bien sûr payer à chaque intervention), pas d’infirmerie (pour les blessures graves, les oiseaux doivent être transférés dans un centre à une 100aine de km de là), pas d’électricité pour stocker la nourriture au frais et faire fonctionner la pompe à eau pour changer l’eau des vautours (ils doivent faire appel aux pompiers du village pour remplir le bassin toutes les semaines, ce qui a bien entendu un coût non négligeable) ni d’eau courante, pas de possibilité non plus d’héberger les volontaires, ce qui réduit considérablement le nombre de candidats… Depuis le déménagement forcé du centre, le nombre de vautours dans le pays a chuté à 100 couples durant ces 3 dernières années ! L’équipe est aujourd’hui réduite à deux personnes : Goran et son fils Marin qui tentent tant bien que mal de faire survivre ce projet avec leur propre argent, mais ils redoutent d’être contraints de fermer le centre l’année prochaine.
leur mission
Les buts du centre sont diverses. Leur mission principale est de sauver les vautours en détresse, de les soigner puis de les relâcher dans leur milieu afin de ralentir au maximum le déclin de la population. Le centre recueille une 10aine de vautours chaque année et, depuis sa création, en a relâché 132. Le centre prend également en charge occasionnellement d’autres types de rapace en détresse. Des études sont également menées sur la population de vautours fauves. Chaque année, ils vont compter et baguer les jeunes dans les nids, soit 953 depuis le début de l’étude ! Ils identifient et tentent de mettre en place des projets permettant de réduire les causes de leur déclin. Le centre travaille aussi beaucoup sur l’éducation et la sensibilisation auprès des locaux mais également auprès des visiteurs du monde entier, autant auprès des enfants que des adultes pour redorer la mauvaise image qu’ont généralement les vautours et faire connaitre les problèmes auxquels ils font face.
les vautours Fauves en Croatie
Le vautours fauve, avec ses 2m85 d’envergure, est le plus grand des oiseaux encore présent en Croatie. Ses 2 plus grands cousins, le vautour moine et le gypaète barbu, ayant déjà disparus de ces contrées il y a quelques 10aines d’années. Malheureusement, le vautour fauve semble suivre la même voie. Il y a 100 ans, les vautours fauves étaient un peu partout en Croatie. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 100 couples (ce qui est sous le seuil de renouvellement de l’espèce) qui nichent sur 5 iles croates : Crès, Prvic, Krk, Plavnik et Rab. La plupart de leurs zones de nidification sont classées comme zones protégées, mais ce n’est pas le cas pour toutes. Malgré les réserves et la protection de l’espèce, aucune mesure n’est réellement mise en place par le gouvernement pour surveiller, contrôler et sévir en cas de perturbation de l’espèce.
La principale cause de la disparition des vautours fauves est le manque de nourriture. Ils sont des charognards, ils ne mangent que des animaux morts, ce qu’ils ont de plus en plus de mal à trouver en Croatie. Il y a 100 ans, il y avait près de 145 000 moutons élevés rien que sur l’ile de Crès. Parmi ce nombre important de moutons, le petit pourcentage d’animaux mourant prématurément étaient suffisant pour nourrir une population viable de vautours. Aujourd’hui, il n’y a plus que 4000 moutons sur l’ile, et le peu qui décèdent sont envoyés à l’équarrissage. Pour des questions d’hygiène, il est désormais illégal de laisser une carcasse dans la nature, au grand dam des vautours dont le rôle principal est de nettoyer la nature et de prévenir la propagation des maladies !
La deuxième principale cause de leur disparition est la perturbation par les touristes durant la saison estivale qui correspond justement à la période où les jeunes vautours apprennent à voler. La spécificité des vautours en Croatie est qu’ils nichent sur des falaises au dessus de la mer, parfois à très basse altitude, ce qui les rend très accessibles aux bateaux de touristes qui s’approchent trop près pour les voir et font trop de bruit pour les faire bouger. C’est alors que les jeunes vautours qui ne savent pas encore voler tombent à l’eau en essayant de s’échapper. Ils n’ont alors que 40 minutes d’espérance de vie avant de se noyer. Même si le courant les ramène dans les rochers, ils seront coincés au pied de la falaise et seraient condamnés à une mort lente. C’est là que l’équipe du centre de conservation intervient pour prendre en charge ces animaux.
Mais les vautours font face à de nombreux autres dangers pour lesquels le centre ne peut pas toujours intervenir comme les empoisonnements (les vautours mangent parfois des animaux morts empoisonnés comme des rats ou des renards, ce qui les empoisonnent à leur tour), la chasse illégale (qui a fortement diminuée depuis la protection des vautours), les collisions avec les lignes électriques ou avec les éoliennes.
De plus, leur mode de reproduction ne leur permet pas un taux de renouvellement suffisamment élevé pour rétablir une population stable. Les couples n’ont qu’un œuf par an et les jeunes ne sont matures qu’à partir de 5 ans. Pendant leurs 5 premières années, ils partent en migration autours de la méditerranée et seul 10% d’entre eux reviendront seins et sauf pour se reproduire sur leur lieu de naissance.
Mon expérience d’écovolontaire
Les journées en tant que volontaire au centre de conservation des vautours fauves sont plutôt calmes, surtout en ce début de saison où les visiteurs et les sauvetages sont peu nombreux. Durant ma première semaine, j’ai surtout participé à des travaux d’aménagement ou de rénovation avec l’aide d’un groupe de bénévoles allemands. Nous avons poncé et repeint les installations en bois ainsi que la barrière et les montants métalliques du panneau d’accueil. Nous avons construit un mur de pierre le long de la volière pour protéger les oiseaux du vent fort et leur offrir de nouveaux nichoirs. Nous avons également fait une sortie en mer pour aller observer les vautours sur les falaises et aller nettoyer la plage de la réserve.
En mai, le centre ouvre habituellement de 12h à 16h car Goran et Marin doivent parcourir près de 100km pour se rendre au centre. La présence de volontaires sur place permet d’ouvrir plus tôt et de leur économiser des trajets en leur évitant de se déplacer tous les jours. Il faut au moins 3 visites dans la journée pour couvrir leur frais de déplacement, ce qui n’arrive pas tous les jours. J’ouvre donc le centre aux visiteurs à 10h, parfois plus tôt si certains touristes arrivent avant, et je ferme entre 16h et 18h en fonction de l’affluence. Mon rôle principale est donc d’accueillir le public et de les guider, de leur expliquer le travail du centre de conservation ainsi que la situation des vautours fauves en Croatie, tout ceci en anglais, en italien ou en français. Je les emmène ensuite voir les oiseaux en rééducation dans la volière via un tunnel aux vitres sans teint afin de ne pas perturber les animaux. Au delà des entrées et des dons des visiteurs qui permettent au centre de continuer ses actions, la sensibilisation du public aux problématiques de la perte en biodiversité dû à l’impact humain est d’une importance capitale pour tenter de renverser la situation.
Le reste du temps, en dehors des visites, les volontaires peuvent être amenés à la préparation des souvenirs, à aider à l’entretien du centre (arrosage des plantes, nettoyage des vitres, balayage, etc…), à aider lors du nourrissage des vautours et du nettoyage de la volière, à aider lors de l’accueil et du relâché des animaux, etc…
Le nourrissage s’effectue 2 à 3 fois par semaine. Marin arrive avec le cadavre d’un mouton dans son coffre qu’il est généralement allé chercher chez un éleveur sur l’ile de Krk. Autant que possible, ils tentent de nourrir les vautours en convalescence avec des animaux morts naturellement ou victimes d’accidents de la route ou de morsures de serpents… Mais malheureusement ces cas restent anecdotiques. Marin apporte alors la carcasse dans la volière en minimisant les interactions avec les vautours. Ceux ci doivent rester sauvages et méfiants de l’homme pour maximiser leur chance de survie après leur relâché. Il découpe la peau du mouton car le bec des vautours n’est pas assez tranchant pour le faire. Il retire ensuite le squelette restant du précédent nourrissage.
Bien que j’ai tout juste raté la cession de bagage des jeunes dans leur nid, j’ai eu le bonheur, durant ma mission, de participer au relâché généralement effectué chaque année fin mai. Le relâché est un véritable évènement, surtout quand cela implique 6 vautours. De nombreux locaux et touristes se déplacent pour y assister ainsi que des chaines de télévisions et des journaux locaux. Il nous faut tout d’abord préparer les candidats au relâché la veille, les capturer, les baguer, les équiper de GPS pour certains d’entre eux, les peser et les mettre dans un box de transport. Le jour venu, il est absolument magique et émouvant de les voir prendre leur envol l’un après l’autre dans un paysage magnifique pour rejoindre la colonie sur l’ile d’en face. C’est une seconde chance qu’on leur donne, parfois même une 3ème, en espérant qu’ils s’en sortiront dans ce milieu hostile qui les attend.
Devenir volontaire au centre de conservation des vautours
Pour devenir écovolontaire au centre de conservation des vautours fauves, vous devez avoir de bonnes notions d’anglais. Pouvoir parler d’autres langues peut être utile pour accueillir les touristes étranger mais pas indispensable. Les volontaires travaillent tous les jours de 10h (ou 12h) à 16h. Les volontaires doivent être indépendants concernant leur logement, leur nourriture et leurs déplacements. Le centre est à 5km du plus proche village où il a y a la possibilité de louer un appartement pour 9€/jour. Autrement, il y a un camping à 3km du centre. Il est donc très utile d’avoir sa propre voiture, ou au moins un vélo, pour se déplacer. A part ça, la participation comme volontaire est entièrement gratuite.
Les aider
Vous souhaitez aider le Centre de Conservation des Vautours Fauves dans leurs actions, vous pouvez :
- Venir leur rendre visite pendant vos vacances en Croatie (4€ l’entrée)
- Faire un don
- Adopter un vautour (30€)
- Devenir écovolontaire
- Parler de leurs actions autours de vous !